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19 septembre 2013


Le coût économique et environnemental du gaspillage alimentaire


En février dernier (voir nos nouvelles des 12 et 26 février), en plein scandale de la viande de cheval, nous nous interrogions sur l’avenir de notre alimentation en soulignant déjà l’énorme gaspillage alimentaire actuel en nous appuyant sur divers rapports de la FAO, du gouvernement français et de l’Institution of Mechanical Engineers britannique.


Le 11 septembre dernier, la FAO a publié un nouveau rapport sur le gaspillage alimentaire (malheureusement seulement disponible en anglais) démontrant comment cette gabegie planétaire affectait le changement climatique et les ressources naturelles (terre, eau et biodiversité).


Ses principales conclusions, sont éloquentes:


  1. chaque année, la nourriture produite sans être consommée engloutit un volume d'eau équivalant au débit annuel du fleuve Volga en Russie, soit trois fois le volume du lac de Genève,

  2. la superficie utilisée pour la produire couvre environ 1,4 milliards d’hectares, soit près de 30% des superficies agricoles mondiales

  3. la production de cette nourriture gaspillée rejette dans l'atmosphère de 3,3 Gigatonnes de gaz à effet de serre, ce qui met cette activité juste derrière les deux pays les plus pollueurs du monde, les Etats-Unis et la Chine

  4. les conséquences économiques directes de ce gaspillage pour les producteurs (à l'exclusion du poisson et des fruits de mer) sont de l'ordre de 750 milliards de dollars par an, à peu près équivalent au PIB de la Suisse ou de la Turquie, ou à 80% du PIB des pays d’Afrique sub-Saharienne (Afrique du Sud exclue).





Selon l’étude de la FAO, plus de la moitié des pertes ont lieu en «amont», c’est-à-dire pendant les phases de production, de manutention et de stockage après récolte. Le reste a lieu "en aval", c’est-à-dire pendant la transformation, la distribution et la consommation. Les pertes en «amont» ont surtout lieu dans les pays pauvres, alors que les pertes en «aval» se produisent principalement dans les pays industrialisés. L’étude souligne aussi que plus la perte se fait tard dans la filière alimentaire, plus son impact sera fort sur l’environnement, car le produit gaspillé incorporera davantage de ressources (énergie, emballage, etc.).


Dans les pays riches, c’est le comportement des consommateurs qui est la principale cause du gaspillage, et donc aussi la principale source de solution, à condition que les consommateurs prennent conscience du problème et modifient leur façon de consommer. Dans les pays pauvres, ce sont les techniques de récolte, de transport et de stockage qui sont à incriminer et où les investissements devraient se faire si on veut réduire les pertes.


La FAO propose un guide (en anglais) pour réduire ces pertes et gaspillages qui reprend toute une série de recommandations dont on peu citer pêle-mêle: l’amélioration des techniques de stockage, la réduction des emballages excessifs et non durables, le changement du mode de gestion de la vente au détail, l’assouplissement des règles sur les dates limite de consommation et les dates limite d’utilisation optimale, la réutilisation des produits éliminés des chaines alimentaires (notamment par des exemptions fiscales sur les produits donnés peu avant la date de péremption, comme c’est déjà le cas aux Etats-Unis), leur recyclage pour produire de l’énergie, etc.


La réduction du gaspillage alimentaire permettrait certainement la mise en place d’un système alimentaire plus durable. Alors que le discours dominant est que l’alimentation de l’humanité à l’horizon 2050 nécessitera une augmentation de 60 à 70% de la production alimentaire en adoptant des technologies encore plus intensives à base d’engrais, de produits chimiques de synthèse et d’OGM, une forte diminution du gaspillage permettrait certainement une transition plus douce vers une agriculture respectueuse de l’environnement qui seule préservera les ressources naturelles, aura des moindres émissions de gaz à effet de serre et qui pourra assurer la nourriture de l’humanité tout en donnant toute sa place à la masse des paysans qui sont aujourd’hui exclus du système alimentaire mondial et se retrouvent dans une situation de sous-alimentation chronique.


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Dernière actualisation:    septembre 2013

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