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20 janvier 2022


Une nouvelle étude montre la contamination généralisée des Français par le glyphosate


À l’heure où l’Union européenne se prépare à statuer de nouveau sur l’utilisation du glyphosate, autorisée jusqu’au 15 décembre de cette année [lire], une étude d’un groupe de scientifiques français parue dans la revue spécialisée « Environmental Science and Pollution Research », mesure le niveau de contamination de la population française par cet herbicide qui est aussi le plus employé [Article Glyphosate ESPR 2022-Français + Fig.pdf].




Rappelons ici que le glyphosate, mis sur le marché en 1974 sous le nom commercial « Roundup », est suspecté d’être cancérigène pour l’homme selon les experts du Centre international de Recherche sur le cancer (CIRC) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à cause du lien établi entre ce produit et le lymphome non hodgkinien (LNH). Rappelons également que, malgré sa grande solubilité dans l’eau et sa dégradation partielle par certains microorganismes présents dans le sol [lire en anglais], le glyphosate peut s’accumuler dans le sol, créant des risques environnementaux [lire en anglais], et, quand il est lessivé par la pluie, il se retrouve dans les cours d’eau et dans la mer.


Les conclusions de l’étude sont très claires : la contamination des Français par le glyphosate est généralisée.


Ce n’est pas là un résultat étonnant, étant donné que la France est le deuxième pays consommateur de pesticides en Europe, et le septième au niveau mondial [lire en anglais], et que l’on a trouvé du glyphosate dans 53 % des échantillons d’aliments et dans 87,5 % des céréales du petit-déjeuner analysés par Générations futures [lire], et dans 100 % des échantillons de céréales enfantines [lire].


À partir de l’analyse de 6848 prélèvements effectués sous contrôle d’huissier et analysés par le laboratoire allemand Biocheck, les résultats obtenus peuvent être résumés dans les points suivants :


  1. Confirmation de résultats déjà connus :

    1. Le glyphosate a été détecté chez 99,8 % des personnes testées, avec une présence mesurée dans les urines à un taux moyen de 1,19 ng/ml (à titre de comparaison, rappelons que la limite maximale de résidus de glyphosate en France pour l’eau potable est de 0,1 ng/ml).

    2. Ces résultats obtenus pour la France sont en accord avec ceux d’études réalisées dans d’autres pays (Danemark 2017 ; Irlande 2018 ; Portugal 2021).

    3. Des taux plus élevés ont été observés chez les hommes, comme l’avaient révélé des études antérieures (Allemagne, 2017), ainsi qu’une diminution du taux avec l’âge déjà constaté ailleurs (États-Unis, 2007 et 2020).

    4. Des taux plus forts sont présents chez les agriculteurs, confirmant plusieurs études passées (États-Unis, 2004, 2007 et 2019 ; Irlande 2017 et 2018).


  2. Confirmation de résultats suspectés :

    1. Les taux sont plus faibles chez les personnes consommant essentiellement des produits de type bio ou autres labels, comme révélé par d’autres auteurs (France, 2019 ; États-Unis, 2020).

    2. Parmi les agriculteurs, des taux plus forts se manifestent chez les viticulteurs, ce qui est à mettre en relation avec l’utilisation intensive de cet herbicide dans les vignobles [lire].

    3. Cn trouve des taux plus élevés de présence chez les fumeurs, probablement explicable par le fait que le glyphosate est employé comme dessiccant peu de temps avant la récolte du tabac.


  3. Des résultats nouveaux :

    1. Les taux observés sont plus forts au printemps et en été, ce qui conforte des études montrant le même phénomène à la surface d’eaux douces ou d’eaux souterraines.

    2. Des taux plus élevés chez les consommateurs d’eau du robinet, de source naturelle ou de puits (ceci ne concerne pas l’eau en bouteille, qu’elle soit étiquetée eau de source ou eau minérale).

    3. Des taux plus faibles chez les personnes consommant de l’eau filtrée.


Osons espérer que ces résultats contribueront à l’interdiction du glyphosate en Europe, non pas pour le remplacer par une autre molécule - comme le proposent les organisations syndicales agricoles européennes à l’instar de la FNSEA française - mais par des techniques culturales qui permettront de lutter contre la compétition entre les cultures et les plantes adventices (les « mauvaises herbes ») sans polluer le sol et l’eau, ni contaminer les consommateurs. En effet, il est peu probable qu’une molécule alternative, si efficace soit-elle, puisse être l’outil d’une action ciblée qui n’aurait aucun effet délétère autre que celui qu’elle doit avoir sur les organismes visés [lire].


Notons aussi les recommandations faites par la Commission nationale Déontologie et Alertes en santé publique et environnement (DAspe) relatives au processus d’évaluation du renouvellement de l’autorisation du glyphosate en Europe qui proposent notamment la création d’un panel de personnalités indépendantes spécialistes de la déontologie de l’expertise scientifique dans le domaine de l’environnement et de la santé publique chargées d’analyser les données disponibles sur le glyphosate et les risques découlant de son utilisation [lire].


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Pour en savoir davantage :


  1. Grau, D. et al., 99% de la population française présentent des niveaux quantifiables de glyphosate dans les urines, les hommes, les jeunes et les agriculteurs présentent des valeurs plus élevées, télécharger le fichier: Article Glyphosate ESPR 2022-Français + Fig.pdf

  2. WorldAtlas,Top Pesticide Using Countries, 2021 (en anglais).

  3. Générations Futures, Résultats exclusifs de recherche de glyphosate dans des aliments vendus en France, 2017.

  4. ANSES,  Étude de l’alimentation totale infantile - Tome 2 – Partie 4 - Résultats relatifs aux résidus de pesticides - Rapport d’expertise collective, Agence Nationale de Sécurité Sanitaire Alimentation, Environnement,Travail, 2016.



Sélection de quelques articles parus sur lafaimexpliquee.org liés à ce sujet :


  1. Le Mexique, premier pays d’Amérique Latine à interdire le maïs OGM et le glyphosate, 2021.

  2. Les pesticides : une question qui empoisonne notre agriculture, 2020.

  3. Le krach alimentaire planétaire : mythe ou réalité ? 2018.

  4. La production et l’utilisation des pesticides : une atteinte aux droits à l’alimentation et à la santé, 2017.

  5. Alimentation, environnement et santé, 2017.

 

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Dernière actualisation :    janvier 2022